Aujourd'hui nous allons explorer le monde animal en compagnie de Daniela, amoureuse des animaux depuis son enfance.
Vous allez notamment découvrir les cafés éthologiques, en savoir un peu plus sur le comportement des chiens et vous poser des questions sur votre relation aux animaux. Bonne lecture !
1) Bonjour Daniela, pouvez-vous vous présenter en quelques mots à nos lecteurs ?
Ok, d’abord pour les présentations mondaines : psychologue diplômée (en général, le commun des mortels prend peur et c’est également un mauvais plan de drague), d’origine allemande (cela n’arrange pas le cas, sauf si je prétend avoir des mensurations de mannequin), chargée d’études marketing freelance (pas parlant pour le commun des mortels).
Bon je vais essayer d’autres mots clé pour ne pas perdre les quelques lecteurs courageux qui sont restés avec nous : Amoureuse d’animaux depuis mon enfance, je n’ai pas pu me résoudre de suivre la voie traditionnelle vétérinaire, car je ne m’imaginais pas disséquer ou tuer un animal de mes mains. Alors, je « dissèque » mon espèce favorite, les chiens, à ma manière : via l’étude du comportement et la photographie/ film (http://www.photo-chien.com/portfolio/daniela_spader.html).
Dans ce cadre, j’ai crée l’association Univers-Cité du Chien (http://www.univers-cite-du-chien.com/) et repris les études cette année, pour préparer un Master 1 en éthologie à l’Université Paris 13 /Villetaneuse.
2) Le 20 novembre a eu lieu un café éthologique. Pouvez-vous nous expliquer ce dont il s'agit?
A l’instar des cafés philosophiques, les cafés éthologiques, organisés par l’éthologue Fabienne Delfour, sont des lieux de rencontre qui proposent un espace de discussion et de débat autour du thème de notre relation à l’animal. Il s’agit de confronter les expériences personnelles et connaissances scientifiques. C’est un espace de réflexion et de partage sur notre relation à l’animal qui est ouvert à tous et à toutes. Je ne connais pas d’autres initiatives de ce genre. C’est une démarche résolument avant-gardiste d’une scientifique !
http://www.animauxetcompagnies.com/page5.php
3) Comment est née cette idée ?
Il faudrait poser cette question à Fabienne Delfour, qui est à l’origine de cette idée révolutionnaire. animauxetcompagnies@gmail.com
4) Qu’est-ce qui vous a conduit à vous intéresser aux animaux un jour ?
En fait, j’ai grandi avec des animaux : ma famille avait des chiens, j’aidais notre voisin, qui avait un troupeau de moutons, à donner le biberon aux petits. J’observais pendant des heures les chevaux qui se trouvaient dans le près devant la maison. Il nous arrivait de recueillir un hérisson ou un oiseau, tombé du nid. En hiver, je voyais les sangliers traverser le champ enneigé.
Les animaux ont toujours fait partie de ma vie et de moi. Je ne peux pas concevoir la vie sans eux. Je me demande plutôt, comment il est possible de ne pas s’intéresser aux animaux, tellement je les trouve fascinants.
5) L’association « Univers-Cité du chien » a pour objectif de mettre à la disposition du grand public l’information scientifique sur la compréhension du comportement du chien. Sur quels types de sujets portent les recherches sur les chiens aujourd’hui ? Qu’est-ce que l’on a découvert récemment ?
L’idée à l’origine de l’association « Univers-Cité du Chien » était de créer un pont entre les connaissances scientifiques du chien et les Français. Pourquoi ? Parce que même si le chien est réputé être le meilleur ami de l’homme, il est également l’animal le plus mal connu. En réalité nos connaissances s’appuient la plupart du temps sur des idées reçues. Ainsi, notre ignorance du fonctionnement du chien sont à l’origine de la plupart des problèmes que nous rencontrons avec lui : de la simple malpropreté aux problèmes d’agressivité. Avec la complicité d’autres passionnés, illustrateurs, jeune cinéaste, Univers-Cité du Chien cherche à convertir les connaissances scientifiques sur les chien en supports de communication ludiques (vidéos, BD).
Aux vues de la méconnaissance générale du fonctionnement du chien, nous n’avons pas besoin pour le moment de puiser dans les découvertes scientifiques extrêmement pointues. Nous utilisons actuellement les connaissances scientifiques de base sur l’espèce canis lupus familiaris, afin de sensibiliser les citoyens sur les problèmes les plus répandus.
Voici quelques exemples :
- Le chien est un être social : c’est un constat banal, mais que trop de personnes oublient : Beaucoup de propriétaires de chiens font subir à leur animal une vie quasi solitaire (le laissant seul toute la journée) et s’étonnent qu’il développe des problèmes comportementaux. Et ce n’est pas un grand jardin qui peut combler ce manque.
- La morsure fait partie du répertoire comportemental du chien. Alors que les media stigmatisent le chien qui mord comme « chien méchant », on oublie que le chien (comme n’importe quel animal) peut se montrer agressif dans certaines situations. C’est le cas par exemple du chien qui se sent menacé et qui ne peut pas s’enfuir (chien qui s’est réfugié sous une table, chien tenu en laisse). L’animal, qui ne peut pas fuir une situation qu’il éprouve comme menaçante n’a qu’une solution : se défendre en attaquant. Une partie des morsures de chiens s’expliquent de cette manière. Tous les chiens peuvent donc mordre, dans certaines situations. C’est pourquoi, il est nécessaire de connaître un minimum de choses sur le chien.
Nous sommes actuellement en train de préparer un dossier sur une autre idée reçue et largement répandue : la dominance chez le chien. Une théorie développée sur la base d’observations sur le loup (une meute de loups régie par un couple alpha = le couple dominant qui a des prérogatives….). D’abord, les études plus récentes menées sur des loups en liberté montrent que la meute est généralement constituée d’un couple reproducteur et de sa descendance. Il s’agit donc d’un groupe de type familial. Dans ce contexte, l’autorité qu’exerce le couple reproducteur sur les membres du groupe est davantage à comprendre comme une autorité parentale que comme une « dominance » (cf Wolves: Behavior, Ecology, And Conservation de L.David Mech et Luigi Boitani, 2007).
Par ailleurs, des études récentes sur des groupes de chiens vivant en liberté suggèrent des différences notables dans l’organisation sociale et ma gestion spatiale entre le loup le chien (cf. Comportement et éducation du chien, Thierry Bedossa et Bertrand L. Deputte, 2010). Il est donc très hasardeux de transposer des études faites sur le loup au comportement du chien, sans en avoir vérifié scientifiquement la pertinence.
6) Aujourd’hui, en 2010, que pensez-vous de la relation homme/animal ?
Nous obligeons l’animal à s’adapter à notre vie moderne et lui enlevons de plus en plus le droit à son « animalité ». Regardez le chien : il a le droit d’être ‘animal’ pour remplir notre vide affectif, pour aider des handicapés, pour servir de jeux interactifs à nos enfants, mais il n’a plus le droit d’être chien :
- Lorsqu’il aboie ou lorsqu’il détruit des choses à la maison, parce qu’il ne supporte pas la solitude à longueur de journée, on parle de « trouble du comportement ».
- Lorsqu’il mord, on le classe « chien méchant » et pense tout de suite à l’euthanasie au lieu de se demander pourquoi ce chien a utilisé ce dernier recours.
- Certains chiens de petite race n’ont plus l’occasion de marcher, parce que leur maîtresse, comme c’est à la mode actuellement, le porte dans ses bras et on s’étonne après que le chien ait des problèmes locomoteurs !
- Un chiot doit montrer un comportement parfait (pas uriner, déféquer dans la maison, pas grignoter les meubles, pas mordiller les mains, pas tirer en laisse). Est-ce qu’on attend d’un enfant de 4 ans d’être un adulte parfait ?
Le chien est arrivé, je pense, à ses limites de capacités d’adaptation. A nous maintenant, de faire un pas vers lui en améliorant nos connaissances de son espèce et de ses besoins naturels.
7) Et pour finir l’éthologie test !
E comme…émotion
Longtemps, la science ne voulait pas admettre les émotions chez l’animal. Heureusement, ce temps est révolu. D’ailleurs, c’est au contact avec les animaux que je ressens le plus d’émotions : c’est comme s’ils arrivaient à effacer la charge lourde que nous impose la rationalité de notre société. Observer les animaux est pour moi comme ce qu’est la peinture, la musique ou la photographie pour d’autres : un moment où le temps s’arrête, où on ne pense plus aux frivolités du quotidien, aux soucis. Un temps où on se sent entier, vrai.
T comme…temps
La relation à l’animal demande du temps. Pas 5 minutes, pas 1 heure. Je ne parle pas du temps mesurable, mais du temps en terme de disponibilité. La relation à l’animal demande de la disponibilité, c'est-à-dire une vraie ouverture à l’autre, pour observer l’autre, se mettre à l’écoute de l’autre. Et la magie s’opère. En revanche, si vous pensez pouvoir jouer avec votre chien, tout en téléphonant avec votre meilleur ami, vous avez perdu.
H comme…homme
Plus particulièrement mon homme J que j’admire, parce qu’il m’accompagne et m’encourage dans ma voie, même si cela lui coûte des sacrifices. Une espèce rare !
O comme… observer
Observer est la base de toute compréhension de l’animal. S’il y a UN conseil à donner à tous ceux qui possèdent des animaux domestiques : arrêter d’écouter les autres, mais observer votre animal, en essayant de faire abstraction de tout ce que vous pensez savoir sur son espèce, de tout ce que vous avez pu entendre. Regardez-le, comme si c’était un extra-terrestre qui vient débarquer sur la planète terre (un grand merci pour cette métaphore à l’enseignant et chercheur passionné et passionnant Dominique Fresneau).
L comme…lien d’attachement
Certains centres de dressage proposent d’éduquer le chien à votre place. Ils vous proposent un chien « prêt à emploi ». Après, les propriétaires de chiens s’étonnent que le chien ne « fonctionne » pas avec eux. A force de vouloir « dominer », « maîtriser » le chien, nous oublions que la base de toute démarche éducative est l’attachement qui se crée entre deux êtres. Sans ce lien, qui assure un sentiment de sécurité et de confiance aux deux, l’éducation n’est pas possible, que ce soit pour un enfant ou pour un chien. (Attention aux mauvaises langues : je ne suis pas en train de dire que le chien est un enfant, mais que l’éducation nécessite un lien d’attachement).
O comme…obéissance
L’éducation ou plutôt le dressage du chien vise malheureusement la plupart du temps l’obéissance du chien. Ne serait-il pas plus judicieux de plutôt penser l’éducation/ le dressage du chien comme le moyen d’apprendre au chien de (sur)vivre dans notre société d’humains ? Honnêtement, à quoi cela sert qu’un chien maîtrise le « couché », si on ne lui a jamais expliqué qu’il ne faut pas sauter sur une personne, pour lui souhaiter la bienvenue ? Qu’il faut déposer la crotte dans le caniveau ? Ou qu’on ne l’ait jamais habitué aux voitures, aux enfants….
G comme…génétique
Les média stigmatisent certaines races de chiens comme « chiens dangereux ». Comme si les gènes étaient les seuls responsables de l’agressivité d’un chien et qu’il suffirait d’éliminer cette race pour résoudre le problème. Alors que la morsure d’un chien est la résultante de l’interaction de multiples facteurs (comportement de la victime, situation, vécu du chien). Il n’y a pas de réponse toute faite à la question de la morsure de chien.
I comme…Ignorance
L’ignorance est le malfaiteur n° 1 de l’animal. Ignorer les besoins de son animal de compagnie signifie éventuellement le torturer (même si on ne se rend pas compte). Ignorer le fonctionnement de son animal de compagnie, c’est mal interpréter les signaux qu’il envoie. C’est la porte ouverte aux malentendus…et souvent à l’origine d’une histoire qui aurait pu être belle mais qui finit à la SPA. C’est ce qu’on cherche à combattre avec Univers-Cité du Chien.
E comme…. Emerveillement
Ce que je ressens tous les jours au contact des chiens et des animaux en général. Ils me fascinent par leur différence. Je n’ai jamais été attirée par les tentatives de rapprocher les animaux de l’être humain (du style « génial, les signes savent apprendre à parler le langage des muets »). Je trouve que ces approches passent à côté de la singularité de l’animal. Ce qui m’intéresse, c’est justement leur différence, leur manière d’être dans ce monde, leur manière à eux de résoudre les problèmes qui se posent à eux.
Chère Daniela,
Merci beaucoup pour ce témoignage très instructif, qui donne envie d'en savoir plus !
Retrouvez ici tous les liens cités par Daniela :
(http://www.photo-chien.com/portfolio/daniela_spader.html
http://www.animauxetcompagnies.com/page5.php
http://www.univers-cite-du-chien.com/
3 commentaires:
Toujours des animaux ici aussi ! je les adore! malheureusement, c'est vrai que notre chien est le plus souvent tout seul.. mais comment faire autrement quand on travaille???
oui, la vie professionnelle n'est pas toujours facile à concilier avec les besoins du chien.
Mais des solutions existent.
De plus en plus de professionnels serieux proposent de longues promenades pour chiens en meute. (ex. http://www.promenonsnousdanslesbois.fr/) lorsque leur maître est absent: ils viennent chercher le chien chez vous, le promènent et le ramènent.
Moi, j'ai opté pour la solution suivante: avec d'autres propriétaires de chiens du quartier (ou d'un village), on organise des gardes alternées, selon les disponibilités des uns et des autres. (Bon, il faut quand même que les chiens s'entendent et qu'on ait des affinités avec les autres propriétaires de chien)
On peut également se mettre à la recherche de jeunes retraités qui aiment la marche / randos. Ce genre d'activités est tellement plus sympa avec un chien....
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