Chers lecteurs,
Aujourd'hui je vous invite à New York pour rencontrer une artiste française, Stéphanie Corne, qui nous parle de son parcours, de sa démarche et de son dernier projet.... Bonne découverte !
Parle nous un peu de toi...
Je suis une artiste vivant à New York depuis 20 ans qui travaille dans les décors, la décoration d'intérieure et la facilitation graphique.
Je suis une artiste vivant à New York depuis 20 ans qui travaille dans les décors, la décoration d'intérieure et la facilitation graphique.
Je viens de faire
une grande avancée dans mon travail artistique personnel.
Il fallait absolument
que cette série que j'avais en moi sorte enfin après 8 ans consacrés à ma
famille nombreuse, à un business pendant une récession et plein d’autres soucis.
Je peux dire honnêtement que je me suis reconstruite dans ce travail artistique
"Facemotions".
J'ai toujours fait de la peinture. Mon Bac était spécialisé en arts
plastiques, j'ai un diplôme de designer textile. J'ai toujours essayé de
travailler le plus possible de manière à avoir des responsabilités d'un point
de vue créatif.
La raison pour laquelle je continue est que c'est vraiment partie intégrante
de ma personne. Les mots ne sont pas mon langage au départ, le langage de la
couleur, des traits le sont bien plus. L'émotion à vif, sans les mots nous
parle sans phrase, sans son. C'est un rapport direct.
Ma série a un aspect politique et social et c’est donc une démarche
solidement ancrée dans les mots mais l'œuvre artistique est la source de sens ultime
pour moi. Mon travail mélange abstrait et figuratif parce que je ressens les émotions
comme des formes abstraites qui changent, qui apparaissent et disparaissent. Un
peu comme des couleurs dans l'eau. La juxtaposition de l'abstrait et du
figuratif sont pour moi comment je vis les choses à chaque moment.
Peux-tu nous raconter comment est né ton
projet Facemotions ? De quoi s'agit-il ?
"Facemotions" est un composite donc de visages et d'émotions. Ce
qui m'intéresse c'est la représentation d'une émotion que la personne ressent et
de peindre sur une partie de sa tête.
Le travail fini est la photographie d'une personne sur laquelle j'ai peint
une émotion. Derrière cette personne, il y a généralement une peinture que j'ai
faite préalablement et qui donne le ton à l'ensemble. Je voudrais pouvoir
peindre tout le monde. Comme tout le monde a des émotions, mon travail
s'adresse à tous et toutes. Sans limite d'âge bien évidemment.
J'ai ressenti des émotions fortes en voyant
certaines photos de la série Vitiligo. Comment a été vécu ce projet par ceux
qui y ont participé ?
Quand je suis allée à Detroit pour la journée Internationale du Vitiligo en
Juin 2013 grâce à la fondation VR, je ne savais pas à
quoi m'attendre. J’ai expliqué à l’audience que pour moi, les personnes atteintes
de Vitiligo étaient toutes magnifiques et de grande inspiration artistiquement.
Les gens dans la salle étaient curieux parce que ce sont des personnes qui
se sentent souvent exclues, qui vivent une souffrance personnelle et sociale.
Ils ne se sentent pas particulièrement "beaux". Moi, mon travail en
tant qu'artiste est fondamentalement de voir ce qui est beau au delà des codes esthétiques.
J'ai expliqué que Facemotions est une occasion pour eux et elles de
s'affirmer, de montrer sans maquillage qui ils sont, tels quels. De dire: « Voila, c'est moi et je m'accepte tel que je
suis. Non, le Vitiligo n'est pas contagieux, je suis différent(e) et je gère ».
Ainsi je leur proposais de montrer au monde ainsi qu’à eux-mêmes qu’ils sont identiquement humains et esthétiquement
d’une grande poésie visuelle.
Facemotions est le résultat de leur enthousiasme. Ainsi, j’ai pu leur être
utile et mes photos sont utiles à la fondation également. Pour moi, leur peau est
un paysage sur lequel passe une émotion. A la fin du shoot, les personnes
volontaires m'ont dit que les portraits leur ont fait du bien parce que leur
apparence leur cause bien de problèmes dans la vie quotidienne. S'exprimer
devant la camera peut être thérapeutique. Donc, c'était vraiment une belle journée
pour eux comme pour moi.
Il faut savoir que certaines personnes se définissaient avant le Vitiligo comme
étant "African- american", le problème de pigmentation les
blanchissant, elles avaient un travail à faire vis à vis de comment ils sont
vus mais aussi comme ils se conçoivent personnellement. Notre visage est très
public. C'est cette surface de notre corps qui est la plus publique. Par elle
nous sommes jaugés, perçus, jugés quand nous marchons dans la rue par exemple.
Nous portons nos taches, cicatrices, nos empreintes de la vie en interne où
elles se voient en externe aussi. Une blessure peut se voir ou ne pas se voir.
Celles qui se voient ont des conséquences journalières pour les gens concernées.
Pour revenir à l’émotion et au visage : une personne peut être
d'apparence extrêmement calme mais elle bouillonne à l'intérieur et personne ne
le voit. Tout cela m'intéresse passionnément et je voudrais représenter plein
de cas de figures, de visages de gens qui s'expriment par l'opacité de leur
visage mais aussi par la transparence du sentiment dans l'instant, l'instantané
de la photographie.
C'est la véracité du moment qui m'intéresse, l'ineffable représenté. N'est-ce
pas la même chose en sculpture, en musique? L'artiste cherche à représenter
l'instant qui passe et qui contient l'expérience humaine dans son détail, dans
son instant et dans sa multitude parce que nous sommes tous des personnes qui
ressentent et dans notre différence puisque nous somment tous uniques, il y a
ce droit à ressentir, cette richesse, cet élan humain qui nous guide dans nos
choix ou nous fait souffrir aussi.
Dans "Facemotions" finalement je me concentre sur la représentation
de l'expérience humaine par l’émotion et aussi dans notre rapport à l’Autre. Un
portrait, c’est aussi un appel au respect de l'autre, à la dignité de ses
sentiments à soi et ceux et celles des autres. Mon travail continue et il se
penche maintenant sur les personnes Albinos qui sont tuées dans certaines
parties de l'Afrique parce qu'on leur porte des pouvoirs de sorcellerie. Les
Albinos ne sont pas considères comme véritablement humains.
Je crois que mon travail pourrait être utile à différentes causes. Je
souhaite participer à des promotions, des efforts où il est question de droit
de l'homme, droit d'être et de vivre dignement comme tout autre être humain
quel que soit le statut social, couleur de peau, ou âge. Si quelqu'un souhaite
obtenir un simple portrait de lui-même ou elle-même ou souhaite participer à
mon travail artistique ou m'aider à obtenir accès à des communautés, ou fondations qui ont besoin de promouvoir
leur cause: www.stephaniecorne.com
Merci!
Et pour finir, le "Facemotions test" à compléter comme tu le souhaites !
F comme
Francis Bacon
A comme Amour toujours
C comme Cognitif
E comme Emotion
M comme Merlot Ponty
O comme Opacié
T comme Transcendance
I comme Isolement
O comme savoir dire Oui
N comme savoir dire Non
S comme Solidarité
Pour en savoir plus :
Fondation VR : http://vrfoundation.org/
Stéphanie Corne : http://www.stephaniecorne.com/ et http://www.stefo.com/
https://www.facebook.com/stephanie.corne.14
https://www.facebook.com/stephanie.corne.14
Chère Stéphanie,
Je te remercie beaucoup d'avoir partagé tout cela si généreusement avec nous ! Que tes projets, actuels et futurs, soient nourris comme tu le souhaites et que de belles rencontres soient au rendez-vous :)
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